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S.15 Filtre anaérobie

Un filtre anaérobie permet de traiter efficacement différentes sortes d’eaux usées. Il s’agit d’un réacteur biologique à lit fixe comportant plusieurs compartiments de filtration successifs. Lorsque les eaux usées traversent le filtre, les particules sont piégées et la matière organique est dégradée par le biofilm actif qui se forme à la surface du média filtrant.

Cette technologie est largement utilisée comme traitement secondaire pour les eaux noires ou grises et permet une élimination plus efficace des matières solides par rapport aux fosses septiques S.13 ou aux RAC S.14 . Le processus de traitement est anaérobie et fait appel à des mécanismes biologiques. L’abattement des matières en suspension et de la DBO se situe généralement entre 50 et 80 % et peut atteindre 90 %. L’élimination de l’azote est limitée et ne dépasse généralement pas 15 % d’azote total.

Considérations sur la conception

Le prétraitement [PRÉ] est essentiel pour éliminer les matières solides et les détritus qui peuvent colmater le filtre. La majorité des matières solides décantables sont éliminées dans un compartiment de décantation situé en amont du filtre. Dans les petites unités autonomes, le prétraitement est généralement intégré, mais la décantation primaire peut également se faire dans un décanteur séparé T.1 ou à l’aide d’une autre technologie préalable comme la fosse septique S.13 ). Les filtres anaérobies fonctionnent généralement avec un flux ascendant pour réduire le risque de lessivage de la biomasse fixée et donc préserver l’efficacité du traitement. Le média filtrant doit être recouvert d’au moins 0,3 m d’eau pour garantir un écoulement régulier. Le temps de rétention hydraulique (TRH) est le paramètre de conception le plus important par rapport à la performance du filtre et un TRH de 12 à 36 heures est recommandé. Dans l’idéal, le filtre doit présenter une grande surface spécifique pour la croissance des bactéries et avoir une porosité suffisamment importante pour éviter le colmatage. La surface assure un contact accru entre la matière organique et la biomasse fixée qui la dégrade efficacement. Idéalement, le média du filtre doit offrir entre 90 et 300 m² de surface/m3 de volume occupé du réacteur. La liaison entre les compartiments peut être réalisée au moyen de tuyaux verticaux ou de chicanes. Il faut pouvoir accéder à tous les compartiments (par des regards de visite) pour en assurer l’entretien. Le réservoir doit être ventilé pour permettre la libération contrôlée des gaz odorants et potentiellement toxiques. Lorsque les eaux de cuisine sont raccordées au système, un bac à graisse doit être placé avant le compartiment de décantation.

Matériaux

Un filtre anaérobie peut être construit en béton, en ciment, en acier ainsi qu’en fibre de verre, en PVC ou en plastique et peut être préfabriqué. Le média filtrant type a un diamètre de 12 à 55 mm, plus important à sa base et plus petit dans sa partie supérieure. Les médias filtrants couramment utilisés sont le gravier, les pierres ou les briques concassées, les parpaings, la pierre ponce, le verre déchiqueté ou des morceaux de plastique spécialement formés (et même des bouteilles en PVC broyées).

Contexte

Les filtres anaérobies ne sont pas adaptés dans la phase de réponse aiguë d’une urgence, car le milieu biologique du filtre met du temps à se développer. Aussi, ils sont plus adaptés aux phases de stabilisation et de relévement et sont des solutions à long terme. Ils conviennent bien à l’échelle du voisinage, mais peuvent également être mis en œuvre au niveau des ménages ou dans des zones de dessertes plus larges, ou dans les bâtiments publics (écoles). Même s’ils sont conçus de façon étanche, il est déconseillé de les installer dans des zones où le niveau de la nappe phréatique est élevé ou en cas d’inondations fréquentes. Alternativement, des modules préfabriqués peuvent être installés au-dessus du sol. Les filtres anaérobies conviennent à tous types de climats, mais leur efficacité est moindre dans les climats plus froids. Ils sont peu efficaces en termes d’abattement des agents pathogènes et de réduction des nutriments ; en cas de standards de rejet des effluents plus exigeants, il est nécessaire de recourir à une technologie de traitement supplémentaire, telle qu’un bassin de lagunage T.5 ou un filtre planté T.6 .

Fonctionnement et entretien

Une période de démarrage de 6 à 9 mois est nécessaire pour atteindre la pleine capacité de traitement, car la biomasse anaérobie à croissance lente doit d’abord s’établir sur le média filtrant. Pour réduire le temps de démarrage, le filtre peut être inoculé avec des bactéries anaérobies, par exemple en pulvérisant le média filtrant avec des boues de fosse septique. Le débit doit être progressivement augmenté au fil du temps. Les niveaux d’écume et de boues doivent être surveillés pour s’assurer que le réservoir fonctionne bien. À la longue, les particules solides vont colmater les pores du filtre. La masse bactérienne croissante peut aussi devenir trop épaisse, se détacher et éventuellement boucher les pores. Lorsque l’efficacité diminue, le filtre doit être nettoyé en faisant fonctionner le système en mode inverse (rétro-lavage) ou en retirant et en nettoyant le média. L’étanchéité des compartiments doit également être contrôlée de temps à autre.

Santé et sécurité

L’effluent, l’écume et les boues doivent être manipulés avec précaution car ils contiennent une forte concentration en agents pathogènes. Ils doivent subir un traitement supplémentaire en cas de valorisation agricole (fertilisation ou irrigation) ou être rejetés de façon appropriée. Un équipement de protection individuelle complet doit être porté pendant la vidange des boues et le nettoyage du filtre anaérobie.

Coûts

Les coûts d’investissement sont moyens et les coûts opérationnels sont faibles. Ils dépendent de la technologie de transport et de traitement utilisée, de la disponibilité locale et donc des prix des matériaux de construction (sable, gravier, ciment, acier) ou, le cas échéant, des modules préfabriqués ainsi que de la main-d’œuvre. Les principaux coûts d’exploitation et d’entretien sont liés à la vidange des boues ainsi qu’au prix de l’électricité en cas d’usage d’une pompe pour l’évacuation des liquides traités (si écoulement non-gravitaire).

Aspects sociaux

Cette technologie est généralement bien acceptée. En raison de son équilibre microbien délicat, il est indispensable de sensibiliser les usagers afin qu’ils n’utilisent pas de produits chimiques agressifs.

Critères de décision clés

Produits entrants

Eaux noires
Eaux grises

Produits sortants

Effluent
Boues

Phase d'urgence

Stabilisation +
Relèvement + +

Caractéristiques des sols

Niveau d’application

Ménage +
Voisinage + +

Avec et sans usage d’eau

Avec usage d’eau

Niveau de gestion

Ménage +
Partagé + +
Public + +

Complexité technique

Moyenne

Espace requis

Moyen

Objectifs et caractéristiques clés

Confinement des excreta. Abattement de la DBO.

Forces et faiblesses

  • Faibles coûts d’exploitation
  • Résistant aux chocs organique et hydraulique
  • Forte réduction de la DBO et des matières solides
  • Aucune énergie électrique n’est nécessaire
  • Abattement limité des agents pathogènes et des nutriments
  • Nécessite l’intervention d’experts pour la conception et la construction
  • Le retrait et le nettoyage des médias filtrants colmatés est fastidieux
  • Longue durée de démarrage
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